Pourquoi on ne confie pas assez les tâches ménagères aux enfants ?
1- Confier les tâches ménagères aux enfants est bénéfique pour leur développement
Confier les tâches ménagères aux enfants serait bénéfique pour leur réussite future. Pourtant les parents les en dispensent souvent.
« Ah non, il ne faut pas les appeler comme ça ! » Valérie Saleur, directrice de l’école maternelle de La Brèche aux loups, dans le 12e arrondissement de Paris, sourit quand on emploie le mot « corvées ». « Le mot est à bannir. » Le mot, mais pas les tâches.
Si vous avez récemment mis les pieds dans certaines maternelles, vous avez pu y trouver des tableaux récapitulant les « métiers » des enfants:
- Tailleur de crayons,
- rangeur d’étagères,
- responsable de la porte ou encore
- compteur de ceux qui mangent à la cantine.
Inspirée des pédagogies de Célestin Freinet (qui préférait parler de « responsabilités ») et de Maria Montessori (où l’enfant est chargé de l’arrosage d’une plante, par exemple), cette idée s’est répandue dans les écoles publiques. Les pédagogues vous expliquent que c’est l’occasion d’un apprentissage à la fois technique et social pour l’enfant investi d’une tâche face aux autres.
2 Confier les tâches ménagères aux enfants leur donne de meilleures relations avec leurs proches
Des chercheurs se sont déjà intéressés aux bénéfices des « corvées», comme il ne faut donc surtout pas les appeler si vous souhaitez obtenir la participation des enfants.
Si les bienfaits des corvées sautent aux yeux des instituteurs, pourquoi donc ont-elles à ce point disparu du quotidien des enfants ? En France, les jeunes de 11 à 25 ans qui vivent chez leurs parents en font peu, 8 heures par semaine, soit trois fois moins que leurs parents !
En confiant des tâches aux jeunes enfants, « on leur laisse l’occasion de faire des erreurs, d’apprendre de ces erreurs, avant de les laisser conduire ces tâches intégralement, ce qui leur donne confiance en leurs compétences ». « La participation domestique développe aussi l’empathie, puisque vous êtes plus attentif à ce que font les autres. »
Avec sa collègue Elinor Ochs, Carolina Izquierdo a observé et filmé la vie dans des familles de Los Angeles. Aucun enfant ne se charge naturellement de tâches domestiques sans qu’on le lui demande. Sortir la poubelle, mettre la table, ou même s’habiller… Les parents demandent habilement, proposent d’en faire la moitié. A l’occasion, l’enfant accepte de faire l’autre moitié. Et là, surprise, « les adultes félicitent leurs enfants pour des accomplissements auxquels ils ont apporté une assistance considérable ».
Sur les vidéos tournées dans les foyers californiens, des pères défont les lacets d’enfants de 8 ans, des mères préparent les sandwichs de leurs enfants, s’assurent qu’ils les emportent, et surtout, insistent pour que leurs bambins n’oublient pas de manger… Seule responsabilité qui leur incombe encore !
De plus en plus on note « un schéma consistant d’une part pour les enfants à demander aux adultes de faire à leur place des choses qu’ils seraient capables de faire, tout comme l’habitude chez les adultes d’offrir leur assistance sans même qu’on la leur demande »
Pourquoi nos chérubins ne mettent-ils quasiment plus la main à la pâte ? Sûrement parce que les parents craignent de déranger leurs enfants, qui ont déjà tant à faire avec les corvées scolaires… Mais, objecte Carolina Izquierdo, cela n’explique pas pourquoi ces enfants résistent aussi fréquemment à des tâches légères qui ne demandent ni beaucoup de temps ni beaucoup d’efforts, comme de mettre la table ou de débarrasser son assiette.
Une autre explication tient à une définition relativement récente de l’enfance comme une période d’innocence qu’il faudrait protéger des rudesses de la vie. « D’une aide domestique dans quasiment toutes les sociétés traditionnelles, l’enfant est devenu un parasite », écrit David Lancy dans son livre The Anthropology of Childhood (Cambridge University Press, 2008). « Les enfants occidentaux sont protégés du besoin de travailler. Ils n’ont pas de corvées à réaliser, et même la maintenance de leur espace domestique et de leurs possessions leur a été retirée. »
Il observe que la distance avec le monde du travail est devenue un marqueur de modernité des sociétés. Après tout, à raison, personne ne souhaite envoyer ses enfants à la mine pour qu’ils apprennent la vie !
« des pratiques parentales promeuvent… la dépendance »
Quand on fait remarquer à Carolina Izquierdo que beaucoup de sociétés traditionnelles aimeraient offrir à leurs enfants la vie des petits Californiens, elle se défend d’avoir voulu « comparer des pommes et des poires ». « Le plus frappant, ce n’est pas que les enfants en Californie soient chargés de beaucoup moins de travaux domestiques que dans d’autres sociétés, mais surtout à quel point c’est en contradiction avec le discours de leurs parents sur l’importance de la promotion de l’autonomie des enfants, insiste t-elle. Des idéaux culturels d’indépendance s’opposent à des pratiques parentales qui promeuvent… la dépendance. »
Les parents se justifient : ça va plus vite de faire soi-même que de convaincre un enfant affalé sur le canapé. C’est là tout le paradoxe : ce sont les parents les plus débordés, qui donc auraient le plus besoin d’un coup de main, qui s’en rajoutent encore en faisant les choses à la place de leurs petits…
« Parce que ça demande du temps d’avoir un enfant qui s’habille seul le matin ou qui participe à la préparation du repas, le temps qu’il se trompe. Ça peut prendre un quart d’heure en plus », résume Valérie Saleur, la directrice de l’école de La Brèche aux loups. Elle sait de quoi elle parle. « Quand on met en place les responsabilités dans une classe à la rentrée, on rame jusqu’aux vacances d’automne. Après, les habitudes sont prises et c’est tout bénéf… Les parents pressés perdent de vue que cet investissement est un gain de temps pour l’avenir. » Et celui de leurs enfants, à en croire les chercheurs.
Ranger les jeux, c’est une chose mais quand l’acte même de ranger devient un jeu…
Rassembler les chaussettes orphelines est toujours une corvée dont vous êtes la seule à profiter, n’est ce pas ? Et si, vous invitiez vos chers chérubins à jouer avec vous au jeu du « Retrouve l’autre chaussette » ? Tout est dans l’art de présenter les choses, croyez-moi …Et mieux vaut ne pas inviter Papa (lui ne sera pas suffisamment fort à ce jeu) ! Vous allez être surprise du résultat, en plus, votre enfant va développer une agilité à plier les chaussettes par 2. A vous de voir, si vous voulez aller plus loin en lui donnant aussi la responsabilité de ranger les chaussettes pliées dans les armoires correspondantes…
Pour la petite histoire, sachez qu’il existe le jeu éducatif HABA Rafle de chaussettes.
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